Le mur de Berlin - 2010

Publié le par arunninglife.over-blog.com

49 ans, 49ème marathon…

 

Berlin, un top 5 (NY, Londres, Chicago, Paris sont les 4 autres).

 

Plus de 35000 coureurs. 7 box de départ, de A (l’élite) à F. Je suis dans le box D, les moins de 3h30. La plupart des coureurs de RTL sont en E. Nous sommes venus à 41, répartis entre le marathon roller et le marathon. Le samedi, journée tourisme, je marche toute la journée, visitant le cœur historique de Berlin. Dimanche matin, nous partons de l’hôtel, une heure avant la course. Strict nécessaire pour réussir à atteindre son box de départ tant il y a de coureurs. 9h30, nous voilà partis. Aucune bousculade, aucun retard, tout de suite dans le rythme, les gens n’ont pas triché, les moins de 3h30, sont bien des coureurs courant à 12km/h et pas des comiques ayant annoncé un temps bien en deça de leur valeur, histoire de ne pas perdre de temps au départ. Enfin, beaucoup faisait cela à l’époque d’avant le chip. L’instauration du chronométrage réel a permis à beaucoup de faire un chrono officiel égal à leur réelle valeur. Combien de minutes n’ai-je pas perdues dans les années 90 dans les bouchons des débuts de course et les décalages entre le coup de feu et mon passage sur la ligne de départ. Les deux premiers kilomètres sont une longue ligne droite, mon rythme est pris et je n’en dérogerai quasiment pas de toute la course. Je cours sur une base de 5’15 pendant la première partie de la course. Je ne vis pas vraiment cette première partie, car comme à Londres, j’ai la tête ailleurs. En 2004 le genou, ici la cuisse, la douleur va-t-elle se réveiller et transformer mon parcours en galère, pire en abandon. En moins de 1h49 au semi, je me sens bien, la cuisse un peu contractée mais rien d’alarmant. J’ai mis deux emplâtres, un sur la cheville et le second sur toute la cuisse. Ca chauffe ? Non, ça brûle ! Beaucoup d’animations sur le parcours, mais globalement le public est atone, à tel point que certains coureurs exhortent les spectateurs à applaudir. Nous sommes loin de l’ambiance londonienne et new-yorkaise. Des images fugaces, une chanteuse dans une camionnette, des vahinées qui dansent pieds nus, des habitants qui ont transformé leur balcon en sono. Des ravitaillements partout, issus on ne risque pas la déshydratation (vue la météo, se serait difficile). Pour une fin septembre, nous sommes gâtés, un temps idéal pour courir (une quinzaine de degrés tout au plus fort de la journée), une bruine qui parfois se transforme en averse, et même le vent qui s’en mêle après le km 30. J’en ai presque froid dans ma tenue estivale RTL Group. Qu’importe le froid, les kilomètres défilent, le sentiment qui enfle de voir la ligne d’arrivée. Cette immense satisfaction qui peu à peu transforme la course en procession. Je vis mon Berlin, je cours enfin, plus la tête dans le genou ou dans la perspective de l’abandon, je regarde les bâtiments, je vis l’histoire des lieux. Le mur, les zones entre reconstruction et abandon (il y a beaucoup de terrains vagues au cœur de Berlin), les superbes bâtiments du centre. Partir dans le meilleur couloir, je ne verrai aucun des autres coureurs de RTL. Juste les spectateurs RTL, Elmar, notre DG, judicieusement placé à la mi-course, Rémi, et de nouveau Elmar et sa femme au km35, une tape dans la main d’encouragement. Les supporteurs, c’est la dose d’adrénaline qui te relance quand ton moral décline et tes jambes se mettent à souffrir. Les spectateurs qui crient, la musique qui enivre, te transportent, t’emportent un peu plus loin, un moment même plus vite. Cela ne dure pas, car la réalité de la course reprend le dessus. Plus je m’approche du terme, moins j’ai envie de le voir, je voudrais que cette course ne s’arrête jamais. Dans ma tête, je vois déjà la porte de Brandebourg. Mon œil s’attarde un moment sur une dame en petite tenue vantant les mérites de je ne sais quelle marque de lingerie féminine. De rares virages, de longues lignes droites, une chaussée souvent en très mauvais état dans les quartiers Est. Les rails du tram, faire attention, ne pas ruiner son marathon en se vrillant la cheville sur une plaque d’égout. Je fais peu attention au chronomètre, je suis dans les temps que je m’étais fixé entre 3h40 et 3h45, qu’importe la minute exacte, ma vie n’en sera pas bouleversée. Plus j’avance, plus j’ai envie de reculer, c’est vrai, c’est court un marathon, que sont 4 heures comparées aux presque 10h de Bouillon l’an passé. L’effort en solitaire comparé à ça. Ca ce sont plus de 35000 coureurs, venus de partout, dans une ville mythique, pour un marathon mythique, un marathon pour l’histoire. L’histoire s’est écrite ici avec un grand H, entre 1945 et 1990. Tant d’événements dramatiques ont marqué les lieux, tant de bombes ont ravagé cette ville. Et ce mur de la honte qui est tombé il y a un peu plus de 20 ans. Le final est somptueux, la porte de Brandebourg se dessine maintenant. Il n’y a pas de mot, c’est grand, c’est magique. J’en oublie la course, je suis au ralenti depuis le km35, non pas victime des km, mais victime de l’Histoire. J’ai la tête en l’air, je rate même un km, ne consultant pas ma montre, je m’étonne de la durée du 36, et surprise, le 38 arrive sans que le 37 ne se soit manifesté. La porte est bout de la ligne droite, après, il ne restera plus que quelques centaines de mètres. J’ai le bras levé, pas les bras levés, car mon dossard s’étant déchiré, je le maintiens pour ne pas rater la photo, pour que la vidéo me m’enregistre bien passant la ligne. J’ai oublié mes emplâtres qui me brûlent, j’ai oublié les 3h30 de course passées, je vois avec regret la Finish Line. Et pourtant j’en ai rêvé pendant les 30 premiers km, j’en ai rêvé depuis 3 mois, elle se parait de flou quand je boitais à l’entraînement.

C’est fini je passe la ligne avant que le chrono ne bascule au-delà des 3h45. Une fois de plus, mes pronostics étaient justes, temps réel 3h41’53. La minute, les deux minutes perdues dans la contemplation ne changeront rien, ma prévision était 3h40-45, je suis exact au rendez-vous. 49 ans, 49 marathons. Rien à dire, ni à redire. Tout fut parfait aujourd’hui, même si mon corps lui s’en ressentira au cours des deux mois qui vont suivre. Le tendon d’Achille surtout. La bière du vainqueur sera dure à trouver, il me faudra encore patienter 20’ avant de la déguster. Les allées d’après course étant interminables. Une heure plus tard, je gouterai aux souffrances du bain d’après course. Les substances des emplâtres se réactivant au contact de l’eau, donnant l’impression de tremper son corps dans de l’huile bouillante. Enfin les 10’ de calvaire passées, je pourrais enfin me détendre dans l’eau.

Fin d'après-midi au restaurant, une dernière petite bière, fin de trois  mois d'abstinence, 5 kg perdus, un chrono honorable et surtout une superbe course. L'après Berlin se résumera à du repos pour soigner tendinite et contracture. Les 7 épreuves au long cours de 2010 commencent à laisser des traces...

Publié dans Course à pied

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